Précis de droit des sociétés

3 questions à Yves De Cordt

Comme les précédentes éditions du Précis de droit des sociétés, la cinquième édition analyse minutieusement le droit belge des sociétés ainsi que le droit européen et le droit financier qui leur sont applicables, en tenant compte de l’évolution la plus récente de ces matières.

Mais pourquoi cette cinquième édition ? Échange avec Yves De Cordt, Professeur à l’UCLouvain, avocat (PwC Legal), co-auteur du Précis qu’il a rédigé avec Jacques Malherbe, Philippe Lambrecht, Philippe Malherbe et Henri Culot et de nombreux contributeurs.

Le Précis de droit des sociétés 2020, le changement dans la continuité ?

Depuis plus de quinze ans, les évolutions du droit des sociétés et du droit financier belges et européens ont été analysées dans quatre éditions du Précis de droit des sociétés, publiées chez Bruylant en 2004, 2006, 2009 et 2011. Pour cette 5ème édition, l’événement le plus marquant est à l’évidence l’avènement du Code des sociétés & des associations (CSA), dont la laborieuse gestation explique la minutieuse conception de notre ouvrage, fruit d’une collaboration intergénérationnelle au sein de l’UCLouvain. L’approche et la structure de l’édition 2020 sont semblables aux précédentes ; elle comporte, en son livre II, une étude cohérente et intégrée du nouveau droit belge des sociétés, qui transcende les premiers commentaires consacrés au CSA.

Quelles sont les lignes de force du CSA et les évolutions qu'il comporte ? 

 Le vœu du législateur est que notre droit des sociétés soit flexible, fonctionnel et attractif. Afin que les praticiens y trouvent du « prêt à porter » tout en confectionnant du « sur-mesure », trois principes sont mis en œuvre : simplicité, liberté et mobilité.

On distingue plusieurs évolutions et consécrations.

Épurer l’édifice baroque des structures sociétaires en supprimant plusieurs formes : le CSA compte 9 formes de société : 3 à responsabilité illimitée (société simple, SNC & SComm), 3 à responsabilité limitée (SRL, SC & SA) et 3 européennes (SE, SCE & GEIE).

Confirmer qu’à côté du traditionnel « but de lucre », une société peut poursuivre des finalités sociales, caritatives, culturelles ou autres et prendre statutairement en considération ses détenteurs d’enjeux.

Favoriser la mobilité, voire l’ubiquité, des sociétés, en abandonnant le critère du siège réel au profit de celui du siège statutaire, pour déterminer le champ d’application ratione societatis du CSA, et en instaurant des procédures de transformations transfrontalières.

Préserver un équilibre entre la liberté des actionnaires et la sécurité des créanciers : la société à responsabilité limitée (SRL) devient une structure de référence résolument souple :

     > le capital y est supprimé mais les fondateurs doivent prévoir des « capitaux propres de départ » suffisants pour la réalisation de l’activité projetée et les distributions requièrent la « réussite » de tests de solvabilité et de liquidité, notamment pour s’assurer que, suite à la distribution, la société payera ses dettes échues pendant au moins 12 mois ;

     > la promotion de la liberté se marque également par la possibilité d’émettre tout type de titres et d’aménager la cessibilité des actions (avec ou sans agrément), l’opportunité de créer un organe collégial et de déléguer la gestion journalière, la négociation des droits attachés aux actions et l’organisation de procédures de démission/exclusion à charge du patrimoine social.

Moderniser la gouvernance :

     > trois modèles sont proposés aux SA : administrateur unique (configuration analogue à la défunte SCA), administration moniste (conseil d’administration) et administration dualiste (conseils de direction et de surveillance) ;

     > quant à la révocation des administrateurs, la marge de manœuvre de l’assemblée générale est élargie : les statuts peuvent organiser la rupture (avec ou sans préavis/indemnité) mais, à défaut de disposition statutaire, l’assemblée peut accorder, en opportunité, un préavis ou une indemnité ; la révocation sans préavis ni indemnité est toujours possible pour de justes motifs ;

     > deux stratégies coexistent à propos des conflits d’intérêts dans le chef d’un administrateur : soit l’organe compétent prend la décision en suivant une procédure basée sur la transparence et l’abstention de l’administrateur concerné ; soit la décision incombe à un organe « supérieur» (assemblée générale ou conseil de surveillance) ;

     > le régime afférent aux décisions de l’organe d'administration de sociétés cotées concernant une personne liée est développé avec une extension des champs d’application (e. a. pour adopter des propositions d’apport en nature et des projets de fusion, scission ou opération assimilée impliquant une personne liée) ;

     > les statuts peuvent déroger au principe « une action, une voix » (proportionnalité entre risque et pouvoir) : dans les sociétés non cotées, un droit de vote multiple peut être conféré à certaines actions tandis que, dans les sociétés cotées, un droit de vote double peut être octroyé aux actionnaires – loyaux et fidèles – dont les actions libérées ont été inscrites depuis au moins deux ans dans le registre des actions nominatives.

 

Il faut sans cesse remettre sur le métier, n'est-ce pas ?

En effet, l’encre du Précis 2020 était à peine sèche qu’a été promulguée la loi du 28 avril 2020, qui a peaufiné et perfectionné le CSA et a transposé la directive 2017/828 dite « Droit des actionnaires II », visant à promouvoir leur engagement à long terme. Pour une analyse de ces développements, les lecteurs impatients consulteront, dès 2021, la 2ème édition du R.P.D.B. v° Société anonyme; les autres devront attendre la 6ème édition du Précis, dont la publication est envisagée en 2023.


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